Véronique Béchu:”A la brigade des mineurs, on balance sans cesse entre le beau et l’ignoble.”
Cela fait presque 22 ans que Véronique Béchu a rejoint les rangs de la police française. Entrée en service en 2002, celle qui a aujourd’hui le grade de commandante est une spécialiste de droit pénal et de sciences criminelles et elle bataille tous les jours que Dieu fait contre les violences faites aux mineurs.
Il y a sept mois , elle est devenue la patronne du pôle stratégie de l’Office mineurs (OFMIN) et par la même occasion la représentante de la France en matière de lutte contre l’exploitation sexuelle des mineurs auprès des instances internationales.
Dans son premier ouvrage intitulé “Derrière l’écran“: combattre l’explosion de la pédocriminalité en ligne“, paru aux éditions Stock dans la collection essais et documents, elle révèle le développement exponentiel de ces pratiques criminelles qui touchent les enfants et les adolescents.
À un point tel que l’an dernier l’OFMIN, a-t-elle confié dans un entretien diffusé par Franceinfo, aurait eu de quoi ouvrir 871 enquêtes par jour concernant “des viols ou des agressions sexuelles ainsi que des faits de live streaming, de sextorsion, d’échanges de contenus pédocriminels”.
“Le livre de Véronique Béchu est selon son éditeur “un récit personnel et engagé d’un parcours professionnel exclusivement tourné vers la protection des mineurs, qu’elle illustre des dossiers et des rencontres les plus marquants de sa carrière“. Extrait.
“Chacun est inhumain pour des raisons différentes. Notre rôle est d’apporter des élé- ments qui seront analysés et expertisés par d’autres. On peut aussi se demander pour- quoi une victime est victime, pourquoi, par- fois, elle est de nouveau victime. A la brigade des mineurs, on balance sans cesse entre le beau et l’ignoble. On peut entendre un en- fant raconter des atrocités qu’on lui a fait su- bir et qui, une fois sorti de la salle d’audition, se remet à courir, à jouer et à rire. En un cla- quement de doigts. Comme s’il s’était débar- rassé de son fardeau et était juste un enfant...
“Et c’est la même chose avec les mis en cause. On peut avoir avec eux des conversa- tions très naturelles, sur leur vie, leurs hob- bys, pour les mettre en confiance. Et puis, l’instant d’après, lorsqu’on évoque les faits bruts, on tombe dans la noirceur la plus to- tale. Cette double face est à la fois le côté pas- sionnant et très perturbant de nos métiers: ceux qui ont un long parcours de criminel sont parfois indétectables justement parce qu’ils ont ce double visage et ne montrent leur face noire qu’à leur victime. C’est le su- percoach du club sportif qui emmène tous les enfants disputer les tournois, est adulé par les parents, et dont on découvre bien plus tard qu’il a violé des enfants…”
(Propos extraits de l’interview accordée par l’auteure au quotidien du soir Le Monde daté du 29 avril 2024)
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