Anna Maria Maiolino : “Je ne suis pas une artiste linéaire, mais inquiète et changeante.”

Invitée pour la première  dans sa longue carrière à  la Biennale de Venise,  Anna Maria Maiolino,  82 ans, l’artiste d’origine italienne, exilée  au Brésil depuis des décennies a reçu le Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière de sculptrice en particulier. Une cérémonie  qu a eu lieu le 20 avril au Ca’ Giustinian, siège de la Biennale.

La 60e édition qui durera jusqu’au 24 novembre  est intitulée « Stranieri Ovunque – Foreigners Everywhere » (Des étrangers partout) Un choix  de la migration et de l’exil assumé par le commissaire de l’exposition, Adriano Pedrosa.

A l’heure de #MeeToo et de la libération de la parole, celle qui est aussi  vidéaste, dessinatrice et  poétesse de haut vol a  l’habitude de dire : ” Je suis une femme, donc le quotidien a une grande importance dans mon travail. Je n’ai jamais voulu séparer l’artiste de la femme et, notamment, de la femme au foyer. Mon travail a une sensibilité féminine, mais n’a jamais été féministe“. Au Brésil, la native de Scalea en 1942 a cotoyé  la génération des néoconcrets dans les années soixante.

En 1968, l’arrivée de la dicature militaire dans le pays carioca elle s’installe aux Etats-Unis. On peut retrouver ses oeuvres dans les musées les plus prestigieux  tels le MoMA de New York, la Tate Modern à Londres et au  Musée d’art moderne de Rio de Janeiro  et à l’abri chez les collectionneurs les plus réputés

Anna Maria Maiolino (la sculptrice qui magnifie l’argile)
J’ai toujours cru en mon art et je savais qu’il serait reconnu tôt ou tard, car je suis très sincère, et l’art a sa magie particulière. Cela a été difficile, mais les choses sont venues à moi, sans que je me presse. En soixante-quatre ans de travail artistique, jamais je n’ai été invitée à Venise. Revenir, à l’occasion de la Biennale, en Italie, sur la terre que j’ai dû abandonner, est très émouvant…

Je suis née en plein conflit mondial, en 1942, en Italie, j’ai connu la faim et la guerre, mes parents sont partis pour y échapper. J’ai été une Italienne au Brésil, un pays qui a été fait par les migrants, comme toute l’Amérique. Je me suis éloignée de ma terre, cela a été une grande souffrance. Comme pour tous ceux qui ont laissé leur pays.

“Mais, en nous rappelant que nous sommes « étrangers partout », pour reprendre le titre de la Biennale, cette proposition du directeur artistique, Adriano Pedrosa, transforme cette souffrance en bénédiction. En revanche, je ne me sens pas comme une Italienne qui a migré: je suis une personne très multiple. Je ne suis pas une artiste linéaire, mais inquiète et changeante. Dès que je m’ennuie, j’ai envie de nouveaux défis, d’autres discours, de nouveaux médiums.

(Propos extraits d’un entretien accordé au quotidien du soir français Le Monde daté du 28 avril 2024)

Commentaires

Soyez le premier à commenter cet article ...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Revenir au TOP