Zahia Ziouani : “Une femme, jeune, qui vient de banlieue et qui s’appelle Zahia !”

À bientôt 45 ans, qu’elle fêtera le 27 juin, Zahia Ziouani  est une cheffe d’orchestre parmi les plus talentueu(se)s de l’Hexagone. La native de Paris, de mère et de père algériens mélomanes arrivés en France dans les années 70, a construit son immense carrière à force de travail, de sacrifices et de beaucoup de  talent.

Avant de devenir la star reconnue et respectée par la profession, elle avait crée son propre ensemble Divertimento en 1998. Depuis,elle n’a eu de cesse d’être un très puissant trait d’union entre divers univers géogra phiques, sociaux, générationnels  voire historiques grâce à des actions culturelles menées par son orchestre.

Elle a ainsi assuré la direction de l’accompagnement musical du programme Prodiges sur France 2, avec la coordination de soixante chœurs et 11 000 jeunes de la région du Nord, voire la participation à l’événement « Alger, capitale de la culture arabe » en 2007 auprès de l’orchestre national d’Algérie. Une première historique dans le pays d’origine de ses parents.

Zahia Ziouani est une femme engagée qui a tout fait pour convaincre que la musique classique n’était pas condamnée à être  un terrain acquis à une catégorie sociale où peuvent régner toutes les exclusions  basées, selon, sur le sexisme, le mépris de classe voire le racisme.

Zahia Ziouani

Pour bien comprendre ce qui  motive la musicienne qui a grandi  porte de Pantin dans une barre d’immeuble riche de sa mixité, il serait bon et utile  de découvrir le docu-film Divertimento ( sorti en salles le 25 janvier)  qui revient sur le parcours d’apprentissage de la cheffe Zahia Ziouani et de sa jumelle, la violoncelliste Fettouma Ziouani. Passionnant.

Dans ce dernier mot  puisé dans l’entretien qu’elle a donné cette semaine au journal Le Monde, elle évoque la difficulté –  dans un passé pas si vieux que ça – pour les personnes originaires de milieux modestes de franchir les grilles qui enfermaient le monde feutré de la musique classique.@Fayçal CHEHAT

 

 

 

Je me suis posé beaucoup de questions. Pendant longtemps, la musique classique se pratiquait dans des milieux plus bourgeois. Donc voir deux jeunes femmes débarquer ( ndlr, en même temps que sa soeur jumelle)  des quartiers populaires, forcément, ça suscitait l’étonnement, mais aussi des résistances. A cette époque, il n’y avait que des hommes plutôt âgés dans les directions d’orchestre : quand j’ai moi-même dirigé l’orchestre de mon lycée, j’ai bousculé tous les profils auxquels ils étaient habitués – une femme, jeune, qui vient de banlieue et qui s’appelle Zahia ! Je ne m’attendais pas à vivre de plein fouet cette résistance, et surtout cette méconnaissance des gens envers la Seine-Saint-Denis.

Moi, j’avais grandi dans mon petit ­cocon à Pantin, avec pas mal de diversité ­sociale et culturelle. Quand je suis arrivée au lycée Racine, j’ai découvert un tout autre univers. Mes profs, qui voyaient que j’avais d’excellents résul- tats scolaires, me disaient : « Vous venez d’où ? D’Henri-IV ? De Louis-le-Grand ? De Charlemagne ? » Je répondais : « Non, du lycée Marcelin-Berthelot à Pantin. » Et puis : « Ah bon, mais pourtant c’est dans le 93?»

(Extrait d’un entretien exclusif accordé au quotidien français Le Monde daté 6 avril 2023)

 

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