Dans la plupart des  pays de la planète et sur les cinq continents, les analyses se recoupent et le constat se confirme. il n’y a jamais eu, selon de nombreuses études sociologiques, une aussi grande distance  entre  les femmes et les hommes. Avec pour conséquences, le développement du célibat, la baisse constante et généralisée de la natalité et une forme de singularité des vies  et des solitudes. Parfois choisies, souvent subies.

Pourtant, on sait aussi qu’il n’y a jamais eu dans l’histoire de l’humanité autant de moyens de communiquer, grâce aux incroyables avancées technologiques qui ont  donné naissance aux  réseaux sociaux et  au racourcicement des distances permis par la multiplication des moyens de transport  qui favorisent  tourisme et voyages d’affaires.

Dans un entretien passionnant accordé au journal  Le Figaro, la sociologue  et chercheuse  anglaise  Alice Evans (1)  avance  que l’utilisation devenue massive et envahissante du smartphone est paradoxalement en partie responsable  de cette nouvelle tendance sociologique.  En quelque sorte, la mise en « bulles numériques » des genres est en marche.

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« Il est vrai que les smartphones permettent désormais aux individus de sélec-tionner le type d’histoires et de contenus qu’ils consomment. Hommes et femmes s’immergent dans des chambres d’écho idéologiques qui renforcent leurs a priori.

 » Dans les pays conservateurs, les jeunes femmes font, via leur téléphone, ce que j’appelle un « saut culturel ». En Turquie, au Mexique et en Malaisie, des jeunes femmes m’ont parlé de leurs émissions préférées sur Net flix – comme La Fabuleuse Mme Maisel et Emily in Paris. Des séries qui mettent en scène des jeunes femmes émancipées qui ont plusieurs partenaires amou- reux. Comme me l’a dit une femme chinoise : «Les femmes ont changé, les hommes non.» En 2023, la chanson de Miley Cyrus, Flowers, l’histoire d’une jeune femme qui explique qu’elle peut s’acheter des fleurs elle-même, était numéro un mondial sur Spotify, il y a eu plus de 1 milliard d’écoutes!

« Après, je nuancerais l’importance de cet écart politique entre les sexes. C’est un aspect de la déconjugalité mais pas son unique cause. La diminution des occasions de rencontre me semble être un facteur plus déterminant.Ce qu’on observe en effet, c’est que la montée des célibataires coïncide avec la diffusion massive des smartphones et l’élargissement de la gamme de diver- tissements en ligne. Les humains – qu’ils vivent dans des petits villages mexicains ou dans des métropoles de Corée – sont plus souvent seuls que ne l’étaient leurs parents. Or moins les gens se rencontrent dans la vie réelle, moins ils ont d’occasions de se mélanger, de se charmer et de créer des liens« .

(Propos extrait de l’interview parue dans les colonnes du quotidien français Le Figaro daté du9 avril 2025)

(1) Dr Alice Evans  est spécialiste en sciences sociales et développement . Elle rédige actuellement « La grande divergence des genres » : pourquoi toutes les sociétés sont devenues plus égalitaires entre les sexes et pourquoi certaines le sont plus que d’autres. Elle a publié des ouvrages sur le genre, l’urbanisation, les moteurs du changement social, les inégalités et les réseaux de production mondiaux. Elle est membre du King’s College London