Maroc: les dégâts de la criminalisation de l’avortement
La question du droit à l’avortement se pose incontestablement dans tous les pays de la rive sud de la Méditerranée composée essentiellement de pays arabes.Dans tous les cas, la contraception est fortement contrôlée et dans la plupart de ces territoires les interruptions de grossesses sont claiement criminalisées.
Et pour couronner le tout le débat est très limité.Et le Maroc, malgré certaines avancées sur les droits des femmes, n’échappe pas à cette triste réalité. Comme vient de le montrer un rapport détaillé d’Amnesty international intitulé « Ma vie est brisée » qui appelle à une action urgente pour limiter sinon éviter tous les drames.
Le compte rendu de ce rapport a été détaillé dans une interview fleuve accordée au magazine Femmes du Maroc par Stephanie Willman Bordat et Saida Kouzzi, les deux consultantes indépendantes auteures de cette étude pointue.
Au niveau des chiffres, le magazine rappelle que les associations, notamment l’Association Marocaine de Planification Familiale (AMPF), estiment que » le nombre d’avortements pratiqués chaque année au Maroc varie entre 280 000 et 370 000, ce qui représente entre 700 et 1 000 avortements par jour« .
« Les résultats de la recherche montrent comment, à travers les lois et politiques, l’Etat est en train de bafouer un vaste éventail des droits des femmes et des filles, et ceci à chaque étape de ce parcours, depuis leur décision d’être enceinte ou pas, jusqu’aux conséquences du fait de ne pas pouvoir obtenir un avortement sûr et légale. Parmi ces droits, le droit à la vie, le droit à la santé, le droit à la vie privée, le droit de ne pas subir d’actes de torture ou d’autres mauvais traitements, et l’égalité entre hommes et femmes.
« Les réalités décrites dans cette étude démontrent également que la criminalisation de l’avortement est en train de saper les efforts de l’Etat et de la société civile de lutte contre les violences faites aux femmes, le dénuement économique et la discrimination basée sur le genre. Au contraire, la criminalisation est en train de justifier, d’alimenter, et de perpétuer ces violences, ce dénuement économique, et cette discrimination. Pour ces raisons, le rapport appelle le gouvernement marocain à retirer la question de l’avortement du domaine de l’application des lois en tant qu’infraction pénale et d’en faire une question médicale relevant du ministère de la Santé.
« Il faut abroger toutes les dispositions du Code pénal criminalisant le fait de demander, d’obtenir, de pratiquer ou de faciliter un avortement et d’obtenir des informations, médicaments et services liés à l’avortement. Il faut également mettre en place des politiques, plans d’action et ressources qui assurent un accès équitable et en temps opportun des femmes et des filles, à des informations et de services disponibles, accessibles, sûrs, abordables, acceptables et de bonne qualité en matière de santé sexuelle et reproductive, y compris en matière d’avortement, et ceci sans discrimination. »
( Propos extraits de l’entretien publié dans les colonnes du magazine Femmes du Maroc daté du 13 juin 2024) Lien : https://femmesdumaroc.com
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