Malvina Maury, artiste “heureuse et libre”
Malvina Maury! Son nom et son prénom claquent comme un drapeau sur le mat d’un bateau en éternel partance sur les voies océanes à la fois enchantées et incertaines. En route vers la trentaine, la native de Poway, San Diego, en Californie – auteure, compositrice, interprète et humoriste – a déjà un vécu incroyable. Depuis touours ballotée entre l’Amérique, dont elle a connu les âpretés, les promesses et les possibilités présumées infinies, et le sud de la France dont l’apparence nonchalante et romantique peuvent être trompeuses.
La musique et la danse, la blonde Malvina a réusi à les apprivoiser entre la petite enfance et une bouillante adolescence. Si elle a accepté d’en affronter les formations académiques, elle a surtout aimé suivre leurs chemins buissonniers. Ceux qui provoquent les douleurs des chutes multiples et les petits bonheurs de la rémission.
Malvina – ses oeuvres parlent pour elle – est surtout une artiste authentique. L’authenticité, cette valeur qu’elle aime et pratique le plus. Et dont les traits dominants sont la spontanéité, l’imagination débordante, l’enthousiasme. Son credo est le partage de l’émotion. Après huit singles finement ciselés, le grand album ne saurait tarder. Il pourrait alors la lancer vers une notoriété méritée parce que digne de ses efforts et lui permettre de donner vie à terme à son rêve le plus fou; un Musical Show multidisciplinaire dont elle se verrait bien la femme orchestre. Un lieu ouvert à toutes les pépites qui n’ont besoin que d’une petite fenêtre ouverte pour s’envoler vers leur destinée. À suivre.
Méditerranéennes Magazine. Bonjour Malvina, vous ne pouvez raisonnablement échapper à cette première question. Cela fait quelques mois que nos sociétés ont retrouvé une vie « normale », celle qu’on avait fini par appeler “la vie d’avant”, comment avez-vous traversé les deux années de quasi enfermement en tout cas d’empêchement provoqués par la pandémie ?
Malvina Maury : Etonnamment, je l’ai très bien traversée. Car je n’oublie pas que lorsque je suis revenu en France en 2019, je venais de rentrer d’un long séjour aux Etats-Unis où j’ai vécu à cent à l’heure avec des hauts et des bas . Une vie dans une cité de New York très hard où il faut toujours jouer des coudes pour se donner une petite chance d’être remarquée. De retour en France,je n’ai pas eu le temps de m’installer que la pandémie s’est invitée. Et juste avant ce que vous appelez la fermeture, pendant la période ou je participais à de nombreux concerts dans les pianos-bars, j’avais rencontré un producteur qui voulait mettre de l’argent pour que je puisse enregistrer des chansons. J’ai in fine profité de ce blackout incroyable pour prendre des cours avec une coach vocale, j’ai retravaillé mes compositions avant d’enregistrer en studio. En fait, j’ai fait tout ce que j’avais passé mon temps à reporter faute de temps libre.
En parralèle, j’ai eu beaucoup de chance en trouvant le moyen d’être logée sur un bateau ammaré entre Bir Hakeim et la Tour Eiffel. J’avais mon piano à disposition, je me suis remise à l’écriture, et avec tous mes amis, qui venaient me voir entre deux confinements allégés on faisait des “boeufs”. On créait. Ce fut une période faste pour moi. Très productive. Vraiment bénie. Cela m’a permis de me retrouver sans la pression des concerts quotidiens. Certes importants pour faire bouillr la marmite mais qui ne te laissent pas le temps de respirer et de réfléchir. J’en ai donc profité pour faire le point sur mon parcours et mes projets.Voir ce qui avait marché et ce qui n’allait pas du tout. Les contraintes sanitaires levées,pfuit, je suis repartie à l’aventure. De plus belle .
Et qu’avez-vous fait de cette liberté retrouvée ?
Je suis quelqu’un qui est toujours en quête de mouvement. J’ai repris le chemin des Etats-Unis mon autre terre d’accueil. Dès juillet et août, j’étais à New York pour faire la tournée des cabarets, idem à Los Angeles où j’ai rencontré un producteur de talk show. Puis, comme tout le monde, j’ai du me plier aux différents scénarios de la pandémie ponctués de fermetures et de réouvertures, jusqu’à l’embellie que nous connaissons depuis début 2022. En espérant que cette fois ce sera sans retour en arrière.
Et aujourd’hui comment ce sent la femme et l’artiste?
L’artiste se redécouvre tous les jours et voit poindre les premiers arguments de la stabilité professionnelle. La femme se sent de plus en plus sereine et posée. Notament depuis mon retour de New York au début de ce printemps. Plus qu’un appartement à trouver à Paris et la boucle sera bouclée.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que vous avez un sens de l’improvisation très développé. En tout cas c’est un exercice qui ne vous fait pas peur ?
Non, vous ne vous trompez pas. J’aime ça! Là où je me sens le mieux c’est quand j’improvise. Quand je fais du live . C’est de ne pas trop réfléchir et être dans le tac au tac, Pour moi, l’instant présent c’est un vrai cadeau du ciel. Comme je dois avoir une certaine intelligence émotionnelle, j’ai l’impression d’être plus dans l’authenticité.
Votre long séjour aux Etats-Unis y est sans doute pour quelque chose, je me trompe ?
Vous avez tout compris ! En vérité toutes les expériences aident à gagner en assurance notamment pour celui qui érige la spontaneité en étendard. Il faut juste prendre le temps de regarder dans le rétro pour voir si tu vous avez grandi où si vous ressemblez à un disque rayé.
Et puis, ce qui fascine dans votre parcours , c’est cette envie d’aller au contact. Vous êtes à l’aise dans l’ expression autant dans un lieu mythique comme la Caveau de la Huchette, qu’en chantant micro en main à Hollywood Boulevard au milieu des passants ou en posant votre sac dans les rues et les places de Nice pour y performer ..
Je me mets dans mon monde. J’offre de l’amour et je raconte une histoire à ceux qui veulent bien l’écouter. Et il est vrai aussi que “je m’en fiche” des lieux où je m’adonne à mon art. Je suis la même. Je me dépouille de la même façon que ce soit dans la rue, dans une salle de concert, un cabaret ou un opéra. Je suis dans l’audace et le lâcher prise. Je m’oublie. Je ne m’écoute pas chanter. Je ne me regarde pas faire. C’est comme si je me déconnectais.Il se passe comme une dissociation. Peu importe qu’il y ait un, dix spectateurs ou une foultitude.
Mais ce côté fou fou fou, énergique et sans façon ne doit pas faire oublier que vous avez suivi aussi une formation plus classique : à la compagnie des enfants du spectacle ( Nice) et au Broadway Dance Center de New York. Entre autres.
Absolument. J’ai fait de la danse classique à quatre ans, du théâtre à sept ans, la comédie musicale à neuf ans, la compagnie des enfants du spectacle ( Nice) puis au Broadway Dance Center de New York…
Et à l”évidence, ces mutltilpes parcours de formation n’ont pas réussi complètement à vous polir et à vous dénaturer ?
(Large sourire) Ah, non! Vous voyez, je suis restée un électron libre. Et cela se vérifie dans ma façon de vivre. Je suis ainsi: jai toujours fréquenté des milieux différents, eu des amis que parfois tout oppose. J’ai énormément voyagé entre les personnes et les façons de penser. J’aime être à l’écoute. Je trouve que la vie est belle lorsqu’elle est dans la différence et le partage . Pour l’apprécier, il faut être soi-même. Et pour moi, un être humain n’est jamais aussi fort que lorsqu’il est lui-même. Je suis heureuse et libre. C’est le plus important.
À qui pensez-vous quand vous dites de façon très lucide, c’était après la sortie de votre 8e single intitulé « Femme caméleon : « À force de vouloir plaire aux autres, je me suis perdue dans des mondes qui ne m’appartenaient pas. Ils se sont amusés de ma naïveté et je me suis laissée faire. Dans cette engrenage qui s’appelle la vie, je prends le temps pour reconnecter avec mon enfant intérieur…
Je peux expliquer cela en donnant un exemple;. Quand je suis entrée dans le monde du travail, j’ai débuté dans la restauration. J’y ai rencontré bien sûr d’autres personnes, d’autres âmes et avec ces gens-là, j’ai donc commencé à connaître l’alcool, la drogue et toutes les choses qui n’étaient pas moi. Je suis tombée immaquablement dans un cycle de consommation de produits illicites doverses et je suis devenue ces personnes-là. Par exemple, lorsque tu es une fille, artiste qui plus est, qui a envie de plaire, d’être aimée par une personne de ton entourage, alors tu peux perdre le contrôle. Surtout quand tu es jeune et naïve. Quand un homme me montrait qu’il avait envie de moi, alors je faisais l’amour avec lui. Parce que je n’avais sans doute aucun respect de moi et de mon corps. En vérité, j’étais manipulable et sous mauvaise influence. J’ai quitté mon chemin pour suivre celui des autres et ce n’était bien sûr pas une bonne idée. “La femme caméléon ” signifiait que la mauvaise récréation était finie et que Malvina avait décidé de redevenir Malvina
Ce qui est aussi impressionnant chez vous, c’est cette énergie incroyable que vous dégagez sur scène . Vous arrivez à débrider le public et à le mettre en poche en quelques minutes…
En effet, j’ai besoin de tout donner au point de finir lessivée après un show de quatre heures. Je suis dans l’investissement artistique total, mais pas forcément dans l”état d’esprit de “la réussite à tout prix”,” de dents qui rayent le parquet . Mais peut-être que je devrais, non ( grand éclat de rire) .
Comment s’est passée votre enfance Baigniez-vous déjà dans un environnement créatif ?
Pas du tout ! Même si mon père à fait de l’accordéon dans sa jeunesse et que mon oreille musicale en a bénéficié.Et puis, il y avait ma grand mère non voyante qui écoutait beacoup de musique classique, du Chopin particulièrement. Et j’aimais ça. Et puis surtout, dans un environnement familial qui n’était pas idéal, je me suis toujours réfugiée dans mes rêves. À partir de l’âge de cinq ans, je partais dans mes mondes où il y avait évidemment des histoires bien plus jolies que celles que je vivais.. Je m’inventais un amoureux, je chantais, je dansais, je valsais, je devenais chanteuse d’opéra… C’était un besoin. Plus encore, une nécessité !
Les chansons « Je pars ce soir… “, ” Je suis cette fille » ou ” la femme Caméléon” sont tellement émouvantes: comment sont-elle nées ?
“La femme caméléon“, dont en parlé plus haut, est née pendant le confinement. “Cette fille en soirée“, c’était à New York. À son origine, il y avait ce besoin devenu prégnant de me débarasser de l’image insupportable de cette fille que je donnais à voir et qui disait en entrant dans une pièce: ” Hé, hé, hé, regardez-moi, je suis là, je suis là, vous ne me voyez pas ?” . J’ai toujours eu besoin que l’on s’intéresse à moi. Au point d’en faire des tonnes et des tonnes pour faire rire et donner du plaisir. Sans doute, parce que je déborde d’amour. Et comme je ne trouve pas vraiment belle…
Vos créations sont souvent un mélange détonnant de joie et de mélancolie. Peut-on dire qu’elles vous ressemblent. Etes-vous une mélancolique qui s’ignore ?
Oui, je suis une mélancolique. Je le sais comme je respire. j’éi écris mon première poème à l’âge de six ans. Il portait sur la mort…
À ce point ?
Oui. Il faut savoir que j’étais ancrée à cette époque dans un environnement plutôt triste En fait, c’est le monde qui me paraissait triste, très triste. Au point de me faire peur, Avec le temps, pour oublier ça, j’ai développé ce qu’on a déjà évoqué à savoir cet excès d’enthousiasme et d’envie de faire plaisir et de partager tout l’amour que j’ai en moi. Mais, il n’y a pas doute, les passages mélancoliques m’aident . J’ai besoin de me mettre dans des situations de souffrance pour pouvoir rebondir et retrouver de la niaque le lendemain. Je ne sais pas si c’est conscient ou pas mais la mélancolie me donne de l’énergie.
On peut dire que vous êtes une « touche à tout”,eclectique en matière de style, mais vous avez sans doute une préférence pour un projet musical ?
Déjà, je ne me considère pas comme chanteuse, danseuse ou musicienne. Je me considère comme une performer. Mon objectif et mon don, c’est d’avoir l’énergie de déconnecter les gens d’une réalité qui peut-être passable ou très ordinaire. Avec des envolées musicales souvent authentiques, de beaux textes, de l’humour et en incitant mon public à y participer.À y apporter son écot. En vérité, mon but, dans un terme que je ne souhaite pas trop lointain, c’est d’acheter un théâtre et d’en faire un un “Speak easy”. Avec des “live show” tous les soirs sur une grande scène avec contrebasse, piano, chanteurs ou chanteuses. Je pourrais mettre en avant les artistes en les interviewant en direct devant leurs fans. Un vrai délire animé par une présentatrice pluridisciplinaire sachant chanter, danser, improviser…
Lorsqu’on regarde votre parcours, on peut voir une ressemblance avec ceux qu’ont connu les chanteuses de la belle époque, celle des années 50 et 60. Des carrière forgées à la dure école des cabarets, souvent dans l’anonymat, avant de briser le plafond e verre et de voler plus haut que dans leurs rêves les plus fous…
Je le ressens aussi. Je n’aurais pas aimé avoir un succès très jeune et après ne plus en avoir. Je suis plutôt heureuse de progresser dans un relatif anonymat. Je sais qu’avec les expériences humaines vécues tellement enrichissantes parce que pas du tout faciles, je serai bien armée pour “affronter ” le succès quand il frappera à ma porte. Et croyez-moi, j’en ferai bon usage.
Vous êtes une sacrée showman mais aussi une amoureuse des beaux textes Parlez-nous de vos préférences dans ce domaine. Si vous deviez nous dresser votre play liste française et américaine puisque vous êtes aussi une Américaine de coeur…
Ce que j’aime c’est tout ce qui ressemble à du diamant brut. Tous les talents et les artistes qui ne sont pas polis. Ceux qui ont gardé le cuir tanné non pas seulement par l’âge mais par un vécu humain puissant. Ceux qui, alors que gorgés de talent, on fait des efforts insoupçonnés pour sortir la tête hors de l’eau. À l’image de ces anciens dont vous me parlez tels Jacques Brel, Jean Ferrat, Léo Ferré ou Edith Piaf, pour ne citer que certain(e)s. Aujourd’hui, si je dois avancer un nom, je donnerai celui de Loïc Nottet. Ce chanteur belge, qui est également danseur, est habillé d’une beauté artistique bluffante. Je l’ai découvert il y a deux ans en écoutant son somptueux morceau Mr/Mme. Et c’est l’artiste qui me fait le plus rêver. Côté américain, j’adore le rock et le blues. Dans le premier, j’adore cette façon de “dégueuler” cette énergie qui fait sa puissance où la musique l’emporte sur le message. Dans le blues, je suis au contraire fan de l’équilibre qu’il offre. Le rythme musical et le texte sont aussi bouleversants l’un que l’autre.
Propos recueillis par Fayçal CHEHAT
LES PRÉFERENCES DE MALVINA
Votre livre : Le Petit Prince de Saint-Exupéry
Votre série: Dix pour cent
Votre chanson : : « Blow a fuse* » de Betty Hutton
Votre actrice: Julia Roberts
Votre parfum : La vie est belle de Lancôme
Votre sport: La danse
* talent caché : Les claquettes
Votre voyage inoubliable: : Zambie, Zimbabwe Japon Chili
Liens utiles Malvina Maury
Crédit photos: Malvina Maury
Notes
* cette chanson a été connue grâce à la reprise de Björk « it’s oh so quiet »
* *j’en ai fait une chanson avec mon groupe de musique Chaäc
Commentaires