Camille Kouchner: “Je déteste cette notion de libération de la parole”

Il y a un an, presque jour pour jour, Camille Kouchner sortait son livre “ La familia grande” pour  révéler que son frèe jumeau avait été victime de gestes incestueux de la part de son beau-père, le politologue à la grande renommée, Olivier Duhamel. Un livre qui a ressemblé à un séïsme médiatique  et provoqué un tsunami qui réduisait encore plus le barrage de l’omerta en France.Mais l’autrice refuse de parler d’une seconde vague de la libération de la parole concernant les abus sexuels.Une notion qu’elle dit détester par ailleurs. Elle  préfère évoquer une continuité.

Je ne sais pas s’il y a une deuxième vague. Il y a un continuum, avec une meilleure articulation de la pensée. A force d’œuvres littéraires et de témoignages, ça avance… Mais je vais vous étonner, je déteste cette notion de libération de la parole. Cela peut paraître paradoxal, mais pour moi elle charge les victimes d’agressions sexuelles d’une responsabilité immense. C’est comme si on considérait qu’elles n’avaient jamais parlé auparavant et qu’il peut enfin se passer quelque chose parce qu’elles se décident à le faire. C’est à nouveau inverser les rôles entre coupables et victimes. Car je n’ai pas l’impression que les victimes ne se manifestent pas. Il y a différentes manières de manifester quelque chose qui ne va pas : un mal-être, un corps défaillant, des angoisses, des dysfonc- tionnements… On peut être emmuré dans le silence et donner des signaux. La parole se libérerait enfin ? Mais ce n’est pas vrai ! C’est juste que la société prend enfin conscience qu’il y a des maux collectifs, des situations intimes qui concernent tout le monde”.

( Extrait d’un entretien publié par  l’hebdomadaire L’OBS daté du 6-7 janvier 2022)

Commentaires

Soyez le premier à commenter cet article ...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Revenir au TOP