Alejandra Mora Mora : “la génération Me Too”doit tenir compte de l’histoire”
Le débat est vif sur les batailles que mènent les femmes sur tous les continents pour accélérer la marche vers une égalité des droits entre les genres et bannir à jamais les violences subies par les femmes.
Le degré de force de cette opposition diffère selon les pays et les continents. Mais d’après la Costaricaine Alejandra Mora Mora, 52 ans, actuellement secrétaire exécutive de la Commission interaméricaine des femmes – organisation des Etats américains qui regroupe 30 pays – il faut que les très jeunes femmes et hommes engagés dans le mouvement Me Too ,dont l’influence est incontestablement positive, ne doivent pas oublier de maintenir voire créer la connextion avec les féministes traditionnelles qui se battent avec leurs moyens.
Ceux dont elles ont hérités il y a des décennies. Elles doivent imprativement tenir compte des expériences passées. L’histoire de cette bataille pour l’égalité ne commence pas aujourd’hui. Alejandra Mora Mora est avocate, universitaire, militante des droits humains et ancienne ministre de la Condition féminine aus sein du gouvernement de son pays entre 2014 et 2018.
Mots choisis : “Le mouvement des femmes est mondial. Alors quand on voit le mouvement MeToo, d’un instant à l’autre, il se répand partout. L’hymne de “Le violeur, c’est toi” est devenu viral même dans les coins les plus conservateurs. Et il tenait l’État responsable des violations ! Ce qui se passe avec le mouvement féministe mondial, c’est qu’il y a une jeunesse qui défie d’une manière différente. Et oui, bien sûr il prend en compte l’intersectionnalité, et pour cela il comprend mieux les besoins de la population la plus diverse, des Afro, des indigènes… Mais j’ai l’impression que ces jeunes dialoguent peu avec les féministes traditionnelles. Cela reflète une faiblesse structurelle, car parfois ils ont l’impression de tout faire pour la première fois alors qu’il y a une histoire ancienne derrière..”
La dirigeante américaine appelle donc de ses voeux la génération actuelle à faire un pas vers les anciennes. Sans quoi, les résultats demereuraient incertains: ” . Il faut apprendre à comprendre les nouvelles approches, la fluidité du sexe, le nouveau besoin de transgresser le langage pour aborder les choses autrement… Et les plus jeunes doivent respecter un peu plus notre trajectoire historique et collective. Nous avons besoin de grandes conversations. Car si les petites différences qui existent nous séparent, nous oublions que nous avons tout le reste qui nous unit, c’est-à-dire que nous voulons changer le monde. C’est très clair, car cela ne nous sert pas. Ni nous ni eux. Ce qui est merveilleux avec le féminisme, c’est de croire que tout ce qui existe peut être changé (…) Mais ma grand-mère a un monde différent du mien et il continuera d’en être ainsi. Peut-être que ces changements devraient être plus rapides, mais vous avez juste besoin de vous souvenir de l’histoire. Bien sûr, cette histoire est une histoire de luttes continues. Rien ne nous a été donné“.
Des mots qui rappellent clairement le discours tenu par la journaliste et romancière Pascale Robert-Duard dans l’article que nous avons publié précédement.
( Extraits d’un long et passionnant entretien accordé par la Costaricaine Alejandra Mora Mora au quotidien espagnol El-Pais daté du 30 septembre 2022)
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