Badi Lalla,la reine duTindi s’en est allée
La mauvaise nouvelle concerne le monde de la musique algérienne est tombée en début de semaine: la reine du Tindi, Bada Layla, de son nom complet, Bada Lalla Ben-Salem, est décédée au Centre hospitalier (CHU) Nédir Mouhamed de Tizi Ouzou où elle suivait depuis une dizaine des soins palliatifs à la suite d’une longue maladie. Sa dépouille a été transférée dans la foulée à Tamanrasset, dans le grand sud algérien, ou elle devait être enterrée.
Le ministère algérien de la Culture lui a rendu un bel hommage dans un communiqué rendu public le jour même : « Badi Lalla est considérée comme l’une des figures les plus marquantes de la musique touarègue, ayant combiné le tindi traditionnel et moderne, et est devenue une ambassadrice de cet art sur la scène mondiale. Elle a apporté de nombreuses contributions qui ont aidé à mettre en lumière le patrimoine touareg, et a voyagé à travers l’Europe pour participer à des spectacles avec les artistes de « Tinariwin » et des musiciens touaregs«. De son côté, le ministre de la tutelle, Zouhir Ballalou, a présenté les condoléances à la famille de la chanteuse et poétesse à la renommée nationale et internationale.
La chanteuse targuie native de Ain Guezzam était âgée de 88 ans. Spécialiste d’un genre saharien très populaire appelé Tindi (1) , elle était considérée comme la mère spirituelle d’un art ancestral et en même temps celle du peuple touareg. En dehors de ses prestations musicales formidables à la tête de son groupe Tinariwin, en Algérie on rappelle qu’elle a beaucoup participé à la réalisation d’un extraordinaire travail de mémoire en retranscrivant et en traduisant sa poésie, sa musique et ses chansons au profit de l’Officle du Parc national culturel de l’Ahaggar.
Il faut noter que son inspiration musicale dépassait les frontières algériennes puisqu’elle allait la puiser aussi chez les Peuls du Mali, au Niger voire au Burkina Faso.Des racines profondément africaines.Dans les concerts qu’elle a donné dans son pays, puis dans le monde à partir de la fin des années 70 quand elle était invitée dans les festivals internationaux ouverts aux musiques du monde.
Alors que le pays profond succombait depuis des lustres sans modération à ses dizaines de cassettes envoûtantes, son premier album international date de 2017 et a été réalisé avec la collaboration des musiciens et des choristes du groupe Imzad. Mais la Diva de la musique targuie en imposait déjà avec sa voix rocailleuse et puissante, élégament vêtûe du Tisseghnest, l’habit traditionnel des femmes targuies, et ses pas de danse cadencée au rythme tellement lancinant et entraînant pour le public.
Sa carrière internationale entamée alors qu’elle était septuagénaire lui a permis de connaître une partie du monde et de se faire apprécier par le monde, mais, comme elle le répétait souvent aux journalistes qu’elle a appris à apprivoiser, rien ne la rendait plus sereine et plus heureuse que lorsqu’elle retrouvait son home sweet home et les écarts de température de son somptueux Aïn Guezzem: “Je me suis produite dans plus de 75 pays, et c’est dans ce désert que j’aime le plus chanter. Il me rappelle mon enfance.” Badi Lalla aimait tant vivre tout près des étoiles. Elle est finalement partie rejoindre ces astres qui l’ont fait rêver près dun siècle durant. Adieu l’ARTISTE !
#Fayçal CHEHAT
(1) Le Tindi désigne les fêtes à l’occasion desquelles les femmes kel tamashek jouent de cet instrument, le tindé, percussion faite d’un mortier en bois sur lequel on tend une peau de chèvre. Une femme soliste chante et marque le rythme au tindé. Des choristes lui répondent. Au rythme lancinant répondent de manière aussi lancinantes des claquements de main
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